(RE)découvrons notre ville - Luxemburger Wort rue Jean Origer

Notre capitale, vous pensez bien la connaître ? Bien, détrompez-vous ! Certains bâtiments, devant lesquels vous passez régulièrement cachent une histoire particulière. Dr Robert L. Philippart est un véritable expert en la matière et va vous emmener à travers la ville découvrir ces histoires cachées qui vous feront voir d’un autre œil certains bâtiments emblématiques.

Luxemburger Wort, 7, rue Jean Origer

La « Sankt-Paulus-Gesellschaft » avait été fondée en 1886 avec l’objectif de diffusion de la presse catholique. La société commença son travail à la Grand’Rue. En 1905 l’acquisition d’une machine à composer par linotype mit à l’évidence l’étroitesse des locaux. Le Conseil d’administration décida alors de s’installer à la rue Siegfrid, l’actuelle rue Origer. Il y acheta deux immeubles, dont l’un avait été construit en 1887 pour des dominicains et qui servit de chapelle pour les habitants du quartier. L’Eglise du Sacré-Cœur n’allait être construite qu’en 1930. L’installation d’une statue de Notre-Dame de Luxembourg dans une niche de la façade rappelle la présence de cette ancienne chapelle. Les locaux de Saint-Paul permettaient d’acquérir une machine rotative ce qui permit d’augmenter le nombre de pages du Luxemburger Wort. Le développement rapide du quotidien exigea encore l’acquisition d’une troisième machine à composer, puis d’une machine rotative jumelle en 1912. En 1910, le prêtre Jean Origer (1877–1942) avait été nommé directeur de l’imprimerie Saint-Paul ainsi que du Luxemburger Wort. Origer s’était également engagé sur le plan politique. Il était entré en 1922 comme député à la Chambre des Députés. L’évêque de Luxembourg le nomma chanoine du chapitre de la Cathédrale, le pape lui conféra le titre de Chambellan, puis à partir 1933 de prélat romain. Comme directeur de l’imprimerie et du Wort il poussa l’équipement technique à la pointe du progrès. Les éditions Saint-Paul connurent un développement considérable, tout comme le nombre d’abonnés au Luxemburger Wort augmenta rapide. Face à cette demande croissante, les locaux à la rue Jean Origer s’avéraient trop exigus, et le Conseil d’Administration réussit à acquérir en 1936 trois immeubles de la rue Bourbon, dont les propriétés à l’arrière touchaient à celles de la rue Jean Origer

L’invasion du Luxembourg par les Nazis le 10 mai 1940 eut comme suite la dissolution de la maison d’édition et du journal. Ils furent intégrés dans le « Moselfränkischer Zeitungsverlag ». Jean Origer fut arrêté par la Gestapo, la police politique du Troisième Reich et fait prisonnier à Trèves. Il fut ensuite déporté aux camps de Sachsenhausen et de Dachau où il décéda le 17 septembre 1942.

Après la guerre, le 15 mars 1947, la Ville de Luxembourg décida d’honorer la mémoire de ce résistant, en échangeant le nom de rue Sigefried contre celui de rue Jean Origer. Le siège du Luxemburger Wort était ainsi installé dans une rue qui rappelait son ancien directeur. La soicété Saint-Paul avait été reconstituée dès la libération en 1944. D’importantes modernisations des installations techniques étaient à l’ordre du jour, de façon que les locaux étaient à nouveau devenus trop exigus. Des halls de stockages pour le papier furent loués au quartier de la gare. Les immeubles acquis à la rue Bourbon furent démolis en 1955 afin de pouvoir accueillir les nouveaux types de machines de rotation. On profitait de l’occasion pour y aménager une grande salle des fêtes pour l’entreprise. Peu à peu se prépara l’impression Offset, les jours de la composition au plomb étaient comptés. En 1976, le transfert de l’impression classique vers le procédé offset dans tous les domaines de l’édition était décidé. La conséquence en fut l’acquisition d’une machine à imprimer du type Goss-Metroliner-Rotation qui à elle seule nécessita de nouveaux locaux. Saint-Paul allait lancer encore d’autres médias.  Le Conseil d’Administration décida alors le transfert de la rédaction, de l’administration, des éditions, de l’imprimerie et du Luxemburger Wort vers Gasperich. Les nouveaux locaux y furent inaugurés le 14 septembre 1979. Depuis lors, le complexe immobilier sis entre les rues Origer et Bourbon fut dénommé « Am ale Wort » et a été transformé en librairie et galerie marchande. Le guichet d’annonces du Luxemburger Wort, la rédaction du magazine de télévision Télécran et plusieurs sociétés appartenant au groupe Saint-Paul occupaient les locaux administratifs. Des études pour une nouvelle affectation du complexe immobilier sont en cours.

© Archives Luxemburger Wort, Syndicat des Intérêts Locaux Luxembourg-Gare, 60^e anniversaire, 1991, p.166